Page:Sand - L Homme de neige vol 3.djvu/34

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et sénat seront bien forcés de compter avec le bourgeois et le paysan ! Notre roi n’ose pas. Notre reine Ulrique oserait bien, si son mari avait quelque énergie ; mais la sœur de Frédéric le Grand s’arrêterait-elle en chemin, si une fois elle pouvait rabattre l’orgueil et l’ambition des iarls ? J’en doute… Elle ne penserait qu’à étendre le pouvoir royal, sans admettre que la liberté publique doive y gagner. Notre espoir est donc dans Henri, le prince royal. C’est un homme de génie et d’action, celui-là !… Oui, oui ! un temps viendra… Pardon ! j’oublie que vous voulez voir des fourrures, et que vous ne vous intéressez guère à la politique de notre pays ; mais croyez bien que le prince royal…

— Oui, oui, le prince royal, répéta le lieutenant en suivant le major et Christian sous le hangar.

Puis il resta pensif, occupé à apprendre par cœur en lui-même les mémorables paroles que venait de dire son ami, afin de se faire une opinion arrêtée sur la situation de son pays, dont il ne se fût pas beaucoup inquiété s’il eût consulté la philosophie apathique qui lui était naturelle ; mais le major avait une idée, il fallait bien que le lieutenant en eût une aussi, et quelle autre pouvait-il avoir ?… Ce raisonnement le conduisit à mettre sans restriction son espoir et sa confiance dans le génie du prince royal.