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Page:Sand - L Homme de neige vol 3.djvu/77

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viné… La pauvre Karine n’a-t-elle pas été effrayée en me prenant pour son séducteur ?

» Son séducteur ! qui sait ? Cet homme, haï et méprisé de tous, lui a peut-être fait violence. Elle aura caché son malheur, elle aura exploité la croyance aux esprits de perdition, pour empêcher son jeune frère le danneman de s’exposer en cherchant à tirer vengeance d’un ennemi trop puissant. Pauvre femme ! Oui, certes, elle le hait, elle le craint toujours ; elle est devenue voyante, c’est-à-dire folle, depuis son désastre ; elle avait reçu une sorte d’éducation, puisqu’elle sait par cœur les antiques poésies de son pays, et, quand elle s’exalte, elle trouve, dans le souvenir confus de ces chants tragiques, des accents de menace et de haine. Enfin, rêverie spécieuse ou commentaire logique, je crois voir ici le doigt de Dieu qui me ramène à la chaumière d’où j’ai été enlevé… Pourquoi, et par qui… ? Est-ce le danneman, voyageur intrépide, qui m’a conduit au loin pour délivrer sa sœur d’un remords vivant, ou sa famille d’une tache brûlante ? Dois-je croire plutôt à la jalousie de la femme d’Olaüs, selon l’hypothèse rapportée par le major ?

Toutes ces pensées se pressaient dans le cerveau de Christian, et son âme était navrée d’effroi et de douleur. L’idée d’être le fils du baron Olaüs ne faisait