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Page:Sand - La Daniella 2.djvu/176

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qu’au lendemain, j’étais avili et, pour ainsi dire, déshonoré aux yeux des amis les plus respectables et les plus sérieux.

Je me confiai à la Providence, à la loyauté de mon cœur, et je partis en courant, me disant bien que cet empressement, qui n’était de ma part que le désir d’être bien vite revenu, serait peut être traduit plus tard comme une impatience de revoir Medora.

Les réflexions pénibles qui m’assiégeaient m’empêchèrent de goûter le plaisir instinctif de la liberté. Nous avions fait, Daniella et moi, de si doux rêves et de si beaux projets de promenade pour le jour où il nous serait peut-être permis de sortir au grand soleil, appuyés sur le bras l’un de l’autre ! Nous devions être mariés le même jour ; nous ne comptions pas que je serais délivré si vite et si inopinément. Et voilà qu’elle restait seule et tristement prisonnière, tandis que je courais, sans les voir, à travers ces délicieux jardins où nous nous étions promis de cueillir ensemble sa couronne de mariée !

Comme je franchissais cette porte de la villa Falconieri par le cintre à jour de laquelle un vieux chêne passe au dehors une branche énorme, semblable à un bras qui appelle et repousse les passants, la Mariuccia, qui venait à ma rencontre, se jeta à mon cou et m’embrassa avec effusion en demandant sa nièce et mêlant des doutes et des reproches à ses amitiés.

— Attendez quelques jours, lui dis-je, et vous serez sûre de moi, car Daniella sera ma femme. Allez la trouver à Mondragone, distrayez-la d’une heure de mon absence, et surtout ne lui dites pas…

La parole fut suspendue sur mes lèvres par un accès de mauvaise honte. Je venais d’apercevoir, à dix pas devant moi, Medora, qui venait aussi à ma rencontre, appuyée