Aller au contenu

Page:Sand - La Daniella 2.djvu/191

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Daniella vint au bout d’un instant. Sa figure était naïvement radieuse. Je vis bien qu’elle avait profité du moment de répit que lui donnait le mieux de la malade pour écouter ce que je disais à Medora. Celle-ci le devina en jetant un regard d’inquiétude sur la fenêtre entr’ouverte. Du perron de la maison, ou du casino de Baronius, Daniella, sortant par le fond de la chambre de lady Harriet, avait pu tout entendre.

— Vous avez l’air triomphant ! lui dit Medora en frémissant de colère ou de crainte.

— Parce que madame va mieux, répondit Daniella avec une douceur à laquelle je ne m’attendais pas.

— Voulez-vous me suivre dans ma chambre ? reprit Medora agitée. Il faut absolument que je vous parle.

Je remontrai que, d’un moment à l’autre, on pouvait rappeler Daniella pour la malade, et je passai dans la salle à manger, où Brumières venait d’entrer. Je l’emmenai fumer un cigare au jardin, et j’entendis que l’on fermait la fenêtre du salon.

Brumières n’a aucun doute sur la loyauté de Medora à son égard. Il ne me demanda pas compte de l’entretien que j’avais eu avec elle, et je le vis plein d’espoir et de joie.

— Savez-vous, me dit-il, que mes affaires marchent bien ? Dieu conserve la bonne lady Harriet ! Mais, si sa volonté est de la rappeler à lui, Medora, n’ayant plus de parente chez qui elle puisse vivre (elle a usé toutes les autres), va certainement se décider au mariage. Elle y était décidée récemment, puisqu’elle choisissait le vieux prince. Cette folie s’est dissipée à temps, et, puisque la foule des soupirants se réduit à moi seul pour le quart d’heure ; puisque le destin me jette là auprès d’elle, dans cette étape de Frascati, entre le dégoût de son dernier caprice et la mort de son dernier chaperon, j’ai des chances que je ne retrouverai jamais. C’est donc à