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Page:Sand - La Daniella 2.djvu/228

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des pas traînants dans la sacristie. Je m’élançai vers la chapelle de Saint-Antoine, mais notre ami inconnu venait à ma rencontre. C’était un paysan qu’à son chapeau pointu et à son sayon de peau de chèvre j’eusse pris pour Onofrio, s’il n’eût été plus petit d’une coudée.

Je ne perdis pas le temps à le regarder. Le curé sortait de la sacristie pour se rendre à l’autel. Nous étions collés contre la muraille, de chaque côté de la porte, Daniella avec son parrain, moi avec mon témoin. Nous saisîmes tous deux, en même temps, la pianeta, c’est-à-dire la chasuble de l’officiant, et, parlant le premier, je lui dis en lui montrant Daniella voilée : Voilà ma femme ; et Daniella dit de même en me montrant : Voilà mon mari.

Le curé ne m’avait jamais vu ; il m’adressa un sourire presque bienveillant comme pour me dire :

Mieux vaut ce mariage-là que rien.

Il regarda mon témoin, et son sourire devint tout à fait enjoué. Mes yeux se portèrent rapidement sur ce personnage, qui venait d’ôter son chapeau respectueusement devant le prêtre… C’était Tartaglia !

Jusque-là tout allait bien. La figure du prêtre ne rappelait en rien ce rocher poilu auquel l’auteur des Fiancés compare la triste figure de don Abbondio. C’était une figure réjouie, luisante de santé ; l’œil était vif et hardi. Mais cette face épanouie se couvrit d’un nuage sombre lorsque Daniella rejeta en arrière le châle qui cachait ses traits. Le curé fit une grimace menaçante, en voyant auprès d’elle l’athée Felipone. Mais il était trop tard, nous tenions la chasuble, nous avions dit les mots sacramentels qui appellent et forcent la protection de l’Église. L’officiant était obligé de prendre nos noms, de subir la consécration légale de nos témoins et de nous donner in petto la bénédiction nuptiale, en bénissant son troupeau durant la messe.

L’attitude de Daniella durant cette cérémonie me toucha