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Page:Sand - La Daniella 2.djvu/262

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pas. Mon parrain t’aime et ne tirera pas au risque de te blesser. Moi, je tâcherai de le distraire, si c’est une mauvaise pensée qui vient de le surprendre, ou de le confesser et de le convertir, si c’est un parti pris d’avance.

Je ne croyais nullement au danger que supposait Daniella ; je suivis néanmoins son conseil Je m’approchai de Brumières, tandis qu’elle allait rejoindre Felipone, lequel, appuyé sur son long fusil, nous attendait d’un air calme, avec son éternel sourire aux deux coins d’une lèvre épaisse et vermeille.

— Voilà un bijou admirable, me dit Brumières, que je m’arrangeais pour masquer comme par hasard. Regardez comme cette petite tête de bélier est ciselée, et comme ces ornements de filigrane sont sobres et bien placés. Il est impossible que ce berger sache le prix d’une pareille chose, et il faut que vous m’aidiez à lui acheter ça, pas trop cher. Ce sera mon cadeau de noces pour demain, en attendant que je puisse faire mieux.

Je m’approchai avec lui d’Onofrio, non pour aider à tromper celui-ci, mais pour continuer à interposer ma personne entre Brumières et Felipone. Onofrio est d’une probité rigide, ce qui ne veut pas dire qu’il ait un désintéressement aveugle et qu’il soit facile de le tromper. Brumières, en brocanteur exercé, lui demanda négligemment si c’était là une véritable antique, feignit de croire que cela pouvait être une imitation en or de Naples, comme il s’en fait beaucoup, ajouta que ces imitations lui plaisaient d’ailleurs autant que les originaux, et que, copie ou non, il en offrait deux écus romains, voulant bien payer un brave homme instruit et hospitalier.

À cette proposition, la figure douce du berger prit une expression de mépris austère.

— Vous êtes un enfant, dit-il ; rendez-moi ça. Ce n’est