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Page:Sand - La Daniella 2.djvu/67

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comptait se venger de la privation de nous coffrer par le plaisir de nous affamer.

Les choses en étant venues à ce point, nous n’avons pas voulu que vous fussiez victime de nos méfaits. Les vôtres ne nous regardent pas, et nous avons résolu de fêter avec vous la cérémonie des adieux à ce respectable asile de Mondragone, que nous ne reverrons peut-être jamais, et où, en somme, nous n’avons pas beaucoup souffert. J’ai dit. Amen ! Et à votre santé ! fit-il en élevant gaiement un grand verre qu’il vida d’un trait.

— Je ne saurais dire avec vous, observai-je au docteur, que je n’aie pas souffert du tout. Depuis quelques jours, je m’ennuyais effroyablement dans ma solitude, et si j’avais été assuré de votre voisinage, j’aurais travaillé plus assidûment à me frayer un passage jusqu’à vous.

— Ah ! vous y avez travaillé plus que nous ne voulions ! Nous vous avons fort bien entendu miner du côté de l’écroulement. « Ce diable de Français, disions-nous, est capable de nous enterrer tous sous la grande voûte.» On ne sait pas ce que, dans l’état où elle est, un caillou dérangé dans son équilibre accidentel peut nous causer d’embarras. Heureusement, la masure a résisté à vos coups de pic on de pioche ; mais peut-être était-il grand temps de vous ouvrir la porte.

— C’est vous dire, ajouta le prince, que vous ne nous devez aucun remercîment pour notre invitation, puisque nous ne pouvions ni vous laisser exposé à mourir de faim, ni vous permettre de continuer à piocher dans nos vieux murs. C’est à nous, à nous seuls, d’être reconnaissants de la confiance avec laquelle vous êtes venu à nous et du plaisir que nous procure votre société.

Cette confiance que l’on me témoignait, à moi, me mit plus à l’aise que je ne l’avais encore été : aussi je pensai de-