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LA FAMILLE DE GERMANDRE.

buisson, depuis le lièvre qui se tapit dans les grands blés jusqu’au petit insecte qui développe toute son existence sur une feuille imperceptible ; eh bien, à force de voir et de savoir l’histoire de ce monde-là, vous sentiriez le besoin de connaître quelque chose de tout opposé. Votre imagination se porterait vers quelque antithèse bien tranchée, et, s’élançant bien loin du milieu assigné à son développement, elle voudrait s’emparer de quelque autre monde inconnu, fantasque, hétéroclite.

» C’est ainsi que, dès mon jeune âge, avide comme tous les enfants de ce qui n’était pas à ma portée, j’ai fait mon rêve d’acquérir des connaissances qui m’arracheraient aux vulgaires habitudes de ma destinée.

» Mon père avait ces connaissances et possédait quelques ouvrages obscurs, incomplets, arides, que je le voyais consulter rarement, mais toujours avec une grande contention d’esprit. Parfois, au milieu de notre heureuse vie de famille, je le voyais devenir préoccupé et comme assombri. Il semblait combattre une anxiété secrète et ne pouvoir s’en distraire ; elle