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vie pleine de sainteté, puisqu’elle est semée de tant de périls !

Anicée, tu es l’arche sainte qui a toujours vogué en paix sur les flots troublés !



V

LETTRE DE LA DUCHESSE DE FLORES À MADAME DE SAULE


Paris, le 15 novembre 1846.

C’est une amie inconnue qui vous écrit, une âme qui comprend la vôtre, qui l’admire et qui la cherche. Oui, madame, j’ai toujours désiré vivement de vous rencontrer dans le monde ; mais vous n’y allez pas. Pour vous trouver, il faut pénétrer dans les sanctuaires de l’intimité. Étrangère, voyageuse, un peu errante, je n’ai pu saisir l’occasion de former autour de vous des relations qui me missent à même d’arriver jusqu’à vous. Il faut pourtant qu’il vienne, ce moment tant désiré ! Mon bonheur domestique en dépend. Cet aveu fait, je sais que vous ne me refuserez pas.

Vous êtes un être calme comme la perfection. Aucun souci poignant ne peut vous atteindre. Tout le monde n’a pas mérité comme vous du ciel le don de ne plus souffrir. Moi, Espagnole et passionnée, j’ai beaucoup souffert, je souffre encore ; mais je suis peut-être excusable : tout mon crime est d’avoir trop aimé mon mari. Ah ! madame, vous le connaissez, lui, je le sais. Vous avez daigné sans doute le recevoir