Page:Sand - La Filleule.djvu/53

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jours-ci. C’est le plus élégant de ces cryptogames. Sa couleur lilas est d’une nuance admirable, et il exhale un parfum d’iris et de violette.

(Ici reprenait, dans les cahiers, le récit écrit par Stéphen, à une époque très-postérieure de sa vie.)

Dans les premiers jours, je ne fus pas aussi occupé de cette rencontre que bien d’autres l’eussent été à ma place. Il faisait encore un temps magnifique, et les charmes de la promenade m’empêchaient de songer avec regret que ma position ne devait pas me mettre en rapport avec des personnes si haut placées dans ce qu’on appelle le monde. J’allais plier bagage ; d’ailleurs, Roque m’écrivait du Berry et me donnait rendez-vous à Paris pour le 10 octobre.

Il fallait songer à établir mon budget pour la suite de l’éducation de Morena. Je demandai un soir à la mère Floche si elle pourrait s’en charger pour vingt francs par mois. Je ne pouvais faire ce léger sacrifice sans m’imposer de sérieuses privations ; mais gagner vingt francs par mois ne me paraissait pas impossible, n’importe à quelle besogne, et ne devait pas prendre beaucoup de temps sur mes études.

— Monsieur, dit le père Floche d’un air grave, ou nous allons nous brouiller ensemble, ou vous allez reprendre tout ce que vous avez donné pour l’enfant. L’enfant est née sous une étoile, monsieur. Les dames qui sont venues ici l’ont prise en amitié et veulent s’en charger. Ça faisait de la peine à ma femme de s’en séparer si vite ; mais, moi, je trouve que nous sommes trop vieux pour soigner un enfant si petit. Que nous soyons pris d’infirmités l’un ou l’autre, c’est lui qui en souffrira. La femme a donc entendu raison. On lui a fait, bon gré mal gré, un joli cadeau pour son bon cœur, et on emmène la