Page:Sand - La Mare au Diable.djvu/82

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

j’en ai honte. Tiens, ça m’ôte la faim ; je ne veux pas que mon fils soupe, si tu ne soupes pas.

— Laissez-nous tranquilles, répondit la petite Marie, vous n’avez pas la clef de nos appétits. Le mien est fermé aujourd’hui, mais celui de votre Pierre est ouvert comme celui d’un petit loup. Tenez, voyez comme il s’y prend ! Oh ! ce sera aussi un rude laboureur !

En effet, Petit-Pierre montra bientôt de qui il était fils, et à peine éveillé, ne comprenant ni où il était ni comment il y était venu, il se mit à dévorer. Puis, quand il n’eut plus faim, se trouvant excité comme il arrive aux enfants qui rompent leurs habitudes, il eut plus d’esprit, plus de curiosité et plus de raisonnement qu’à l’ordinaire. Il se fit expliquer où il était, et quand il sut que c’était au milieu d’un bois, il eut un peu peur.

— Y a-t-il des méchantes bêtes dans ce bois ? demanda-t-il à son père.

— Non, fit le père, il n’y en a point. Ne crains rien.

— Tu as donc menti quand tu m’as dit que si j’allais avec toi dans les grands bois les loups m’emporteraient ?

— Voyez-vous ce raisonneur ? dit Germain embarrassé.

— Il a raison, reprit la petite Marie, vous lui avez