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la petite fadette

prendre déjà que ton amitié est une très bonne chose, et si bonne, que l’amour en est peut-être une mauvaise en comparaison. Tu as beaucoup de bonté, je le connais à présent ; car je t’ai fait un grand affront auquel tu n’as pas voulu prendre garde aujourd’hui, et quand tu dis que je me suis bien conduit avec toi, je trouve, moi, que j’ai agi fort malhonnêtement.

— Comment donc ça, Landry ? Je ne sais pas en quoi…

— C’est que je ne t’ai pas embrassée une seule fois à la danse, Fanchon, et pourtant c’était mon devoir et mon droit, puisque c’est la coutume. Je t’ai traitée comme on fait des petites filles de dix ans, qu’on ne se baisse pas pour embrasser, et pourtant tu es quasiment de mon âge ; il n’y a pas plus d’un an de différence. Je t’ai donc fait une injure, et si tu n’étais pas si bonne fille, tu t’en serais bien aperçue.

— Je n’y ai pas seulement pensé, dit la petite Fadette ; et elle se leva, car elle sentait qu’elle mentait, et elle ne voulait pas le faire paraître. Tiens, dit-elle en se forçant pour être gaie, écoute comme les grelets chantent dans