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la petite fadette

dénies cette preuve-là, je croirai que tu as encore quelque chose contre moi.

Et il tenta de l’embrasser par surprise ; mais elle y fit résistance, et, comme il s’y obstinait, elle se mit à pleurer en disant :

— Laisse-moi, Landry, tu me fais beaucoup de peine.

Landry s’arrêta tout étonné, et si chagriné de la voir encore dans les larmes, qu’il en eut comme du dépit.

— Je vois bien, lui dit-il, que tu ne dis pas la vérité en me disant que mon amitié est la seule que tu veuilles avoir. Tu en as une plus forte qui te défend de m’embrasser.

— Non, Landry, répondit-elle en sanglotant ; mais j’ai peur que, pour m’avoir embrassée la nuit, sans me voir, vous ne me haïssiez quand vous me reverrez au jour.

— Est-ce que je ne t’ai jamais vue ? dit Landry impatienté ; est-ce que je ne te vois pas, à présent ? Tiens, viens un peu à la lune, je te vois bien, et je ne sais pas si tu es laide, mais j’aime ta figure, puisque je t’aime, voilà tout.

Et puis il l’embrassa, d’abord tout en tremblant, et puis, il y revint avec tant de goût