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la ville noire.

Audebert chanta ses vers, qui plurent à Tonine et à Lise. Elles les apprirent tout de suite et les chantèrent en ville, où ils furent très-goûtés. Audebert était depuis longtemps si sevré de compliments, qu’il fut très-sensible à ceux que lui rapporta Tonine. Le pauvre homme était bon et tendre dans sa vanité ; il y avait en lui autant de besoin d’être aimé que de besoin d’être admiré. Durant sa convalescence, il alla versifier dans la campagne. Sa tête s’y échauffa, et il rapporta des chansons en patois qui étaient réellement jolies. Il les envoya à Tonine par Sept-Épées, qui les lui remit en disant : — Voilà que le pauvre ami change de manie. Il se croit un petit Béranger, et si vous ne trouvez pas le moyen de l’arrêter, il va vous inonder de ses rimes.

— Eh bien ! ce sera ce qu’il aura fait de plus raisonnable en sa vie, dit Tonine après avoir lu les chansons. Écoutez vous-même si ce n’est pas gentil !

Elle chanta d’une jolie voix fraîche, et sans prétention, les vers du vieux rimeur, et Sept-Épées les trouva beaux, ce qui fit grand plaisir à Tonine. Le vieux parrain les écouta aussi, ne les comprit guère,