Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/116

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Je ne suis pas curieuse, allez ; j’ai autre chose à faire qu’à tourmenter mes amis.

— Venez, ma chère enfant, dis-je à la soubrette, et ne craignez rien ; vous n’avez affaire ici qu’à d’honnêtes gens.

La pauvre fille restait debout, éperdue, et triste à faire pitié. Bien qu’elle eût eu le courage de cacher jusque-là le motif de sa visite, elle tirait de sa poche et montrait à demi, dans son trouble, un billet qu’elle y renfonçait de nouveau, partagée entre le soin de son honneur et celui de l’honneur de sa maîtresse.

— Oh ! mon Dieu ! dit-elle enfin d’une voix tremblante, si madame allait croire que je viens ici dans de mauvaises intentions !…

— Moi, je ne crois rien du tout, ma pauvrette, s’écria la bonne Checchina en ouvrant un livre et en lisant au travers d’un lorgnon, bien qu’elle eût une vue excellente, car elle croyait qu’il était de bon air d’avoir les yeux faibles.

— C’est que madame a l’air si bon, et m’a reçue avec tant de confiance, reprit la jeune fille.

— Votre air inspire cette confiance à tout le monde, repartit la cantatrice, et si je suis bonne avec vous, c’est que vous le méritez. Allez, allez, je ne suis pas indiscrète, contez vos affaires à M. Lélio, cela ne me fâchera pas le moins du monde. Allons, Lélio, emmène-la donc ! Pauvre petite ! elle se croit perdue. Va, mon enfant, les comédiens sont d’aussi braves gens que les autres, sois-en sûre.

La jeune fille fit une profonde révérence et me suivit dans le salon. Son cœur battait à briser le lacet de son corsage de velours vert, et ses joues étaient écarlates comme sa jupe. Elle se hâta de tirer la lettre de sa poche, et, en me la remettant, elle recula de trois pas, tant elle craignait que je ne fusse aussi insolent avec elle que la première fois. Je la rassurai par le calme de mon maintien, et lui demandai si elle avait quelque chose de plus à