Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/220

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l’un et l’autre avec les douze cents livres de rente léguées par le curé ; la moitié de ce même revenu avait suffi à la première éducation du jeune homme, l’autre avait procuré une douce aisance à la sobre et rustique existence de Jeanne ; mais Simon, qui désirait vivement aller étudier à Paris, et qui déjà se trouvait endetté à Poitiers après deux ans de séjour, éprouva de grandes perplexités. Il lui était odieux de penser à abandonner son entreprise et de retomber dans l’ignorance du paysan. Il lui était plus odieux encore de retrancher à sa mère l’humble bien-être qu’il eût voulu doubler au prix de sa vie. Il songea sérieusement à se brûler la cervelle ; son caractère avait trop de force pour communiquer sa douleur ; Féline l’ignora, mais elle s’effraya de voir la sombre mélancolie qui envahissait cette jeune âme, et qui, dès cette époque, y laissa les traces ineffaçables d’une rude et profonde souffrance.

Heureusement dans cette détresse le ciel envoya un ami à Simon : ce fut son parrain, le voisin Parquet, un des meilleurs hommes que cette province ait possédés. Parquet était natif du village de Fougères, et, bien que sa charge l’eût établi à la ville dans une maison confortable achetée de ses deniers, il aimait à venir passer les trois jours de la semaine dont il pouvait disposer dans la maisonnette de ses ancêtres, tous procureurs de père en fils, tous bons vivants, laborieux, et s’étant, à ce qu’il semblait, fait une règle héréditaire de gagner beaucoup, afin de beaucoup dépenser sans ruiner leurs enfants. Néanmoins, maître Simon Parquet, après avoir montré beaucoup de penchant à la prodigalité dans sa jeunesse, était devenu assez rangé dans son âge mûr pour amasser une jolie fortune. Ce miracle s’était opéré, disait-on, par l’amour qu’il portait à sa fille chérie, qu’il voulait voir avantageusement établie. Le fait est que la