Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/232

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leur sein et ne grondent pas parmi les décombres ; de mystérieux ruisseaux, cachés sous la mousse, filtrent goutte à goutte le long des parois granitiques et s’y creusent parfois un bassin qui suffit à désaltérer la bécassine solitaire ou le vanneau à la voix mélancolique. Le bouleau allonge sa taille serrée dans un étui de satin blanc, et balance son léger branchage sur le versant des ravins rocailleux ; là où la croupe des collines s’arrondit sous le pied des pâtres, une herbe longue et fine, bien coupée de ruisseaux et bien plantée de hêtres et de châtaigniers, nourrit de grands moutons très-blancs et couverts d’une laine plate et rude, des poulains trapus et robustes, des vaches naines fécondes en lait excellent. Dans les vallées, on cultive l’orge, l’avoine et le seigle ; sur les monticules, on engraisse les troupeaux. Dans la partie plus sauvage qu’on appelle la montagne, et où le vallon de Fougères se trouve jeté comme une oasis, on trouve du gibier en abondance, et on recueille la digitale, cette belle plante sauvage que la mode des anévrismes a mise en faveur, et qui élève dans les lieux les plus arides ses hautes pyramides de cloches purpurines, tigrées de noir et de blanc. Là aussi le buis sauvage et le houx aux feuilles d’émeraude tapissent les gorges où serpente la Creuse. La Creuse est une des plus charmantes rivières de France ; c’est un torrent profond et rapide, mais silencieux et calme dans sa course, encaissé, limpide, toujours couronné de verdure, et baisant le pied de ces monti ameni qu’eût aimés Métastase.

Somme toute, le pays est pauvre ; les gros propriétaires y mènent plus joyeuse vie que dans les provinces plus fertiles, comme il arrive toujours. Nulle part la bonne chère ne compte des dévots plus fervents. Mais le paysan économe, laborieux et frugal, habitué à la rudesse de son sort, et dédaignant de l’adoucir par de folles dépenses,