Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/245

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Eh ! sans doute, armateur en épiceries. Eh ! mon Dieu ! à présent il va faire le commerce des bestiaux. Je ne sais pas lequel est moins noble du mouton ou de sa graisse, du bœuf ou de sa corne, de l’abeille ou de son miel. Cependant ces gens-là s’imaginent que la propriété d’une terre les relève, surtout quand il y a quelque vieux pan de muraille armoriée qui croule sur le bord d’un ravin. Jolie habitation, ma foi ! que celle du château de Fougères ! Avant de la rendre supportable, il lui faudra encore dépenser cinquante mille francs. Je parie qu’il avait là-bas une bonne maison bien close et bien meublée, sur la vente de laquelle il aura perdu moitié, dans son empressement de revoir ses tourelles lézardées et ses belles salles délabrées, où les rats tiennent cour plénière.

— Il m’a pourtant semblé, reprit Bonne, être un homme dégagé de tous ces vieux préjugés.

— Est-ce que tu le crois sincère ? répondit vivement M. Parquet. Il se peut qu’il aime l’argent, et j’ai cru m’en apercevoir, malgré la sottise qu’il a faite de racheter son fief… mais sois sûre qu’il est encore plus vaniteux que cupide. Quand tu verras un noble cracher sur son blason, souviens-toi de ce que je te dis, Bonne, tu verras ton père travailler gratis pour les riches.

— Avez-vous fait attention à sa fille, mon père ? dit mademoiselle Parquet en sortant d’une sorte de rêverie.

— Eh ! eh ! si j’avais seulement une trentaine d’années de moins, j’y ferais beaucoup d’attention. Ce n’est pas qu’il faille croire les mauvaises plaisanteries de nos amis, Bonne, entends-tu ? J’ai toujours été un homme sage et donnant le bon exemple ; mais je veux dire que mademoiselle de Fougères est une gaillarde bien tournée et qui a une paire d’yeux noirs… Je n’ai jamais vu d’yeux aussi beaux, si ce n’est lorsque Jeanne Féline avait vingt-cinq ans.