Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/246

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— Il y a longtemps de cela, mon père, interrompit Bonne en souriant.

— Eh ! sans doute, il y a longtemps, répondit l’avoué. Je n’avais que quinze ans alors. Je la regardais lorsqu’elle allait à l’église ; c’était un ange, belle comme mademoiselle de Fougères, et bonne comme toi, ma fille.

— Et croyez-vous, mon père, que mademoiselle de Fougères ne soit pas aussi bonne qu’elle est belle ?

— Oh ! cela, je n’en sais rien ; si elle est bonne, c’est de trop : car elle a de l’esprit comme un diable et tout le jugement qui manque à son père.

— Elle ne me paraît pas approuver beaucoup son obstination à revoir Fougères, et le séjour de notre village paraît la tenter médiocrement, » ajouta mademoiselle Bonne.

Tandis que le père et la fille devisaient ainsi, la mule, arrivée à la porte du logis, s’était arrêtée, et M. Parquet, en mettant pied à terre pour ouvrir cette porte et en cherchant la clef dans ses poches, continuait la conversation, sans faire attention à Simon Féline, qui était à deux pas de lui, appuyé contre la haie de son jardin.

« Sans doute médiocrement, répétait l’ex-procureur. Une fille de cet âge-là, qu’on amène en France, doit avoir laissé sur la rive étrangère quelque damoiseau épris d’elle. Si j’avais été le galant d’une si belle créature, je ne me la serais pas laissé enlever.

— Est-ce votre avis en pareille matière, monsieur Parquet ? dit Simon en souriant.

— Au diable ! grommela M. Parquet. Oh ! bonsoir, voisin Simon, répondit-il ; vous écoutiez ? Vraiment, pensa-t-il en faisant entrer dans sa cour le mulet qui portait Bonne, je ne viendrai donc jamais à bout de me persuader que je suis vieux et que ma fille est jeune ? Ah !