Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/260

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semblait hautaine et froide. En outre, on blâmait beaucoup dans le pays ses courses à cheval et son genre de vie solitaire. En province, tout ce qui est excentrique est criminel. Cependant l’attrait de curiosité qui, chez Simon, se cachait sous ces efforts d’aversion, ne fut pas satisfait par les réponses vagues qu’il obtint. Il se résolut à presser de questions mademoiselle Bonne, qui seule semblait connaître un peu l’étrangère. Jusque-là, Bonne avait détourné la conversation lorsqu’il s’était agi de sa mystérieuse amie ; mais, lorsque Simon insista, elle lui répondit avec un peu d’humeur :

« Cela ne vous regarde pas. Quel que soit le caractère de mademoiselle de Fougères, il ne lui plaît pas apparemment qu’on le juge, puisqu’elle ne le montre pas. Elle m’a priée, une fois pour toutes, de ne jamais redire à personne un mot de nos conversations, quelque puériles et indifférentes qu’elles pussent être. Il y a bien des choses dans son caractère que je ne comprends pas ; elle a beaucoup plus d’esprit que moi. Qu’il vous suffise de savoir que c’est une personne que j’estime et que j’aime de toute mon âme. »

Simon essaya de la faire parler en piquant son amour-propre. « Si vous voulez que je vous dise ma pensée, chère voisine, reprit-il, vous saurez que je doute fort de votre intimité avec mademoiselle de Fougères. Je croirais presque qu’il y a de votre part un peu de vanité, je ne dis pas à être liée avec notre future châtelaine, mais à être la seule confidente d’une personne si réservée dans sa conduite et dans ses paroles. D’abord, permettez-moi de vous demander en quelle langue s’expriment ces épanchements de vos âmes, car mademoiselle de Fougères ne sait pas, à ce que l’on dit, assembler trois phrases de la nôtre. »

Mais cet artifice ne réussit point. Bonne se prit à sourire