Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/330

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mille suppositions, dont la plus constante était celle d’un engagement pris en Italie, en raison d’un amour contrarié. Cependant, comme mademoiselle de Fougères ne parlait jamais de retourner dans son pays, quoiqu’elle fût majeure et libre de quitter son père ou de lui arracher son consentement, il était probable qu’il n’y avait plus pour elle aucun espoir de ce côté-là. C’était peut-être à un mort qu’elle conservait cette noble fidélité, que M. Parquet ne regardait cependant pas comme inviolable. Il encourageait donc Simon à garder l’espérance, et le pauvre enfant, quoique rongé par cette espérance dévorante, la conservait malgré lui, tout en niant qu’il l’eût jamais conçue.

Cependant les mois et les années s’écoulèrent sans apporter aucun changement dans leur situation respective, et l’espoir de Simon s’évanouit. Mademoiselle de Fougères se montra constamment la même : aussi bonne, aussi dévouée, aussi exclusivement occupée de lui ; mais jamais il n’y eut plus dans ses lettres une parole équivoque, jamais dans ses manières une contradiction, si légère qu’elle fût, avec ses paroles. Sa vie fut toujours aussi solitaire, aussi calme au dehors, aussi orageuse au dedans. Lorsque le feu de la jeunesse tourmentait cette tête ardente, le grand air, le vent des montagnes, la chaleur du soleil, suffisaient à la rafraîchir ou à l’éteindre par la fatigue. Quelquefois elle se levait avant le jour, allait brider elle-même son cheval, et disparaissait avec lui jusqu’au soir. Jamais on ne la rencontra en aucune compagnie que ce fût. Deux pistolets d’arçon, dont elle se fût fort bien servie au besoin, et un grand chien-loup horriblement hargneux qu’elle s’adjoignit pour garde du corps, la mettaient à l’abri des hommes et des bêtes.

D’ailleurs, au bout d’un certain temps, elle avait inspiré assez d’estime et de respect pour être sûre de ne