Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/331

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rencontrer nulle part d’hostilité insolente ou de trouver partout des défenseurs empressés. L’opinion, qui s’abuse souvent, mais qui s’éclaire toujours, redevint peu à peu équitable envers elle. Quoiqu’elle fît des libéralités fort strictes, eu égard à l’argent qu’on lui supposait disponible ; quoique son maintien semblât toujours allier et son caractère incapable d’aucune concession à la force populaire, le peuple du village et des environs, émerveillé de la pureté de ses mœurs avec une vie si indépendante et une beauté si remarquable, la prit, sinon en grande amitié, du moins en grande considération. On lui demandait plus souvent des conseils que des aumônes, et on se laissait volontiers guider par elle dans les affaires délicates. M. Parquet prétendait qu’elle lui enlevait beaucoup de clientèles, à force de concilier des inimitiés et d’apaiser des ressentiments. La sagesse et l’équité semblaient être la base de son caractère et en exclure un peu la tendresse et l’enthousiasme.

Simon le pensait ainsi ; Parquet, devant qui elle s’observait moins, en jugeait autrement. Souvent, lorsqu’ils parlaient d’elle ensemble, le jeune homme opinait que l’amour était une passion inconnue à Fiamma ; Parquet secouait la tête.

— Qu’elle n’en ait pas pour toi, lui disait-il, je n’en répondrais pas ; je ne sais plus à quoi m’en tenir à cet égard ; mais qu’elle n’en ait jamais eu pour personne ou qu’elle ne soit jamais capable d’en avoir, c’est ce qu’on ne me persuadera pas aisément. Tu plaides mieux que moi, Féline, mais tu ne connais pas mieux le cœur humain. Sois sûr que j’ai surpris chez elle bien des contradictions : par exemple, un jour elle nous fit un grand discours pour nous prouver qu’il valait mieux soulager peu à peu le pauvre, et l’aider à sortir lui-même de sa misère, que de lui donner tout à coup le bien-être dont