Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/129

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savent tirer un si bon parti. N’était-il pas insensé de croire qu’un diamant pouvait briller dans la nuit comme un phare, et la chaleur agréable que j’éprouvais en dépit du climat n’était-elle pas probablement due à une disposition physique particulière ? Quant à l’horrible scène du navire, elle était dénuée de toute vraisemblance. Mon oncle, bien que sévère, avait jusque-là montré à son équipage autant d’équité que de sollicitude. Nos compagnons avaient bien pu s’enivrer pour fêter le début de leur hivernage, j’avais pu les voir endormis dans l’entrepont ; mais l’horreur de leur mort, les paroles insensées et cruelles de mon oncle, ses conventions inouïes avec les Esquimaux, enfin, et plus que tout le reste, l’apparition subite de Laura sur le Tantale, au fond des mers polaires, tout cela était marqué au coin de l’hallucination la plus complète.

La pensée que j’étais sujet à des accès de folie me jeta dans une grande tristesse ; je résolus de veiller sur moi-même et de faire les plus grands efforts pour m’en préserver.