Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/175

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de la nature me jeta dans l’extase, mais irrita singulièrement Nasias.

― Certainement, dit-il, c’est une fort belle chose et sans analogue dans le monde connu ; mais je m’en serais fort bien passé. Nous arrivons trop tard. Quelque cataclysme imprévu a ouvert le chemin des eaux à la bouche béante de l’axe terrestre.

― Vous flattiez-vous donc, lui dis-je avec ironie, de trouver un passage souterrain, un tunnel praticable d’un pôle à l’autre ? Sans doute vous avez vu cela dans ces globes de carton que traverse une broche de fer, et vous avez peut-être rêvé que notre globe terrestre roulait sur une forte barre aimantée aux deux bouts. J’ai rêvé cela aussi quand j’avais six ans ; mais vous me permettrez d’en douter aujourd’hui et de trouver très naturel qu’une vaste région de montagnes tourbeuses disposées en cirque ait son écoulement circulaire dans le lieu le plus profond. Si nous avons traversé hier une terrasse saine et fertile, c’est qu’elle est préservée de l’inondation perpétuelle par le torrent