Page:Sand - Le Dernier Amour, 1882.djvu/284

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rosité, vos peines secrètes ; mais je les ai depuis longtemps pénétrées.

Elle se crut encore perdue.

— Ah oui ! s’écria-t-elle en tombant comme prosternée devant moi, vous savez tout, je le vois bien !

— Pourquoi cette attitude de repentir ou de désespoir ? repris-je : de quoi et à qui demandez-vous pardon ?

Elle se releva, effrayée de son trouble, et recommença à me regarder étrangement.

— Vous n’avez, repris-je, aucun tort que je sache dans cette situation, ou, si vous en avez envers Tonino, je ne puis en être juge. J’ai vu que ce jeune homme était très-mécontent de son sort malgré tous les sacrifices que vous aviez faits pour le satisfaire. Vous vous êtes plainte amèrement à moi de son ingratitude, et je vous ai vue redouter le préjudice que son ambition pouvait vous porter. J’ai réfléchi et je l’ai interrogé. J’ai su ce qu’il voulait. Il est dégoûté du pays et de sa condition actuelle. Il veut de l’argent comptant et sa liberté. Je lui ai conseillé de partir, il est parti. Je lui ai promis l’argent dont il vous disait avoir besoin, vous le lui enverrez. Vous serez ainsi délivrée de ses plaintes et de vos impatiences, de ses obsessions et de l’indignation qu’elles vous causaient. Vous ferez un sacrifice nécessaire à votre repos et au mien, sacrifice qui me paraît peu de chose auprès des avantages que vous en retirerez sous tous les rapports.