Page:Sand - Le Diable aux champs.djvu/313

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée



SCÈNE III


Sur le théâtre des marionnettes, qui représente une maison de campagne


CASSANDRE, PIERROT, son jardinier.

CASSANDRE. — Oui, je te dis que tu es un imbécile, et que si tu te fais vacciner, je te chasse de mon service.

PIERROT. — Dame ! je n’y tiens pas beaucoup, monsieur Cassandre ; mais on m’a dit que ça me conserverait le teint frais.

CASSANDRE. — Voyez l’animal, avec son teint ! une figure de navet, avec des yeux de betterave !

COTTIN, dans le public, riant aux éclats. — Ah ! voilà les pièces que j’aime ! C’est quand il y a des légumes dedans !

CASSANDRE, sur le théâtre. — Je te dis que je t’interdis la vaccine ! C’est une invention du diable !

PIERROT. — Pourquoi donc ça ?

CASSANDRE. — Parce qu’elle est nouvelle.

LE CURÉ DE NOIRAC, dans le public. — Bou ! c’est une pièce contre les conservateurs. Gare à nous !

LE CURÉ DE SAINT-ABDON. — Bah, bah ! il est permis de rire ! Nous ne rions pas si souvent !…

PIERROT. — On m’a dit pourtant que ça empêchait la petite vérole.

GERMAIN, dans le public, tout haut. — C’est vrai que ça l’empêche ! Faut pas dire le contraire !

CASSANDRE, sur le théâtre, se tournant vers le public. — Moi je vous dis le contraire. (Parlant à Pierrot.) Et vous êtes une bête de me contredire. On n’empêchera jamais la petite vérole.

GERMAIN, dans le public. — Eh si !

CASSANDRE, sur le théâtre, à Pierrot. — Tu n’es qu’un malhonnête de m’interrompre, et si ça t’arrive encore, je te ferai tâter de ma canne.