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MAURICE. — Je vous avoue que je m’illusionne parfois sur leur compte, et que je ne suis pas toujours bien sûr qu’elles ne se moquent pas de nous après la pièce !




SCÈNE VII


Dans le théâtre


Au prieuré.


LES ARAIGNÉES.

Une ! deux ! une, deux, d’un bout à l’autre ! filons, filons, travaillons, il fait sombre.

Travaillons pour qu’au jour naissant nos toiles nouvelles soient tendues. On a détruit aujourd’hui notre ouvrage, on a ruiné nos magasins et traîné nos filets précieux dans la boue. N’importe, n’importe ! une, deux, filons !

Que tout dorme ou veille, que le soleil s’allume ou s’éteigne, il faut filer, une, deux ! d’un angle à l’autre ? Tissons tissons, croisons les fils, le travail console et répare !

Tissons, filons, prenons les angles. Et vous, qui détruisez le travail des jours et des nuits, vous qui croyez nous dégoûter de notre œuvre, balayez, ravagez, brisez. Une, deux toujours, toujours, filons, tissons, et travaillons jusqu’à l’aurore.

Dans les vieux coins, dans l’abandon et la poussière, nuit et jour la pauvre araignée grise tisse la trame de son existence ; active, patiente, menue, adroite, agile, une, deux ! la pauvre araignée persévère. On la chasse, on la ruine, on la poursuit, ou la menace ; une, deux, la pauvre araignée recommence !

Pour l’empêcher de travailler, il faut tuer la pauvre araignée. Mais cherchez donc nos petits œufs, cachés là-haut