Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/118

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moi je n’avais jamais vu de si beau sable, — nous sommes entrées dans un chemin encore plus étroit que la route, et, après un peu de marche dans des encaissements de terrains boisés, nous nous sommes trouvées à l’entrée du château, qui est tout ombragée et sans grande apparence ; mais sur l’autre face on domine tout le bel enfoncement que nous venions de parcourir. On revoit le talus profond avec ses rochers, ses buissons, la rivière avec ses arbres, ses prés, ses moulins et l’échappée tortueuse où elle fuit entre des rives de plus en plus étroites et encaissées. Il y a dans le parc une source très-belle qui en sort pour se laisser tomber en pluie le long du rocher. Le jardin est bien fleuri. Dans la basse-cour, il y a un tas de bêtes qu’on me permet de gouverner. J’ai une chambre délicieuse, bien isolée, au plus beau de la vue ; la bibliothèque est la plus grande pièce de la maison. Le salon de la marquise rappelle, pour la disposition et l’ameublement, celui de Paris ; mais il est plus grand, plus sonore, et on y respire. Enfin je suis bien, je suis contente, je me sens revivre. Je me lève avec le jour, et jusqu’à l’heure du lever de la marquise, qui, Dieu merci, n’est pas plus matinale ici qu’à Paris, je vais donc m’appartenir d’une manière agréable. Oh ! comme je vais marcher, et t’écrire, et penser à toi en liberté ! Hélas ! si j’avais là seulement un de nos enfants, Lili ou Charlot, comme je le promènerais, comme je lui apprendrais à connaître toutes les choses de la campagne ! Mais j’ai beau me prendre d’amour pour tous