Page:Sand - Le Péché de Monsieur Antoine, Pauline, L’Orco, Calman-Lévy, 18xx, tome 2.djvu/275

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chaque forme, lui fit sentir toutes les beautés des œuvres qui composaient l’ensemble, et le fit pénétrer, pour ainsi dire, dans les entrailles de l’église. Franz écoutait avec une attention religieuse toutes les paroles de cette bouche éloquente qui se plaisait à l’instruire, et, de moment en moment, reconnaissait combien peu il avait compris auparavant cet ensemble d’œuvres qui lui avaient semblé si faciles à comprendre. Quand elle finit, les lueurs du matin, pénétrant à travers les vitraux, faisaient pâlir la lueur des cierges. Quoiqu’elle eût parlé plusieurs heures et qu’elle ne se fût pas assise un instant pendant toute la nuit, ni sa voix ni son corps ne trahissaient aucune fatigue. Seulement sa tête s’était penchée sur son sein, qui battait avec violence, et semblait écouter les soupirs qui s’en exhalaient. Tout à coup elle redressa la tête, et, levant ses deux bras au ciel, elle s’écria :

« Ô servitude ! servitude ! »

À ces paroles, des larmes roulant de dessous son masque allèrent tomber sur les plis de sa robe noire.

« Pourquoi pleurez-vous ? s’écria Franz en s’approchant d’elle.

— À demain, lui répondit-elle. À minuit, devant l’Arsenal. »

Et elle sortit par la porte latérale de gauche, qui se referma lourdement. Au même moment l’Angelus sonna. Franz, saisi par le bruit inattendu de la cloche, se retourna, et vit que tous les cierges étaient éteints. Il resta quelque temps immobile de surprise ; puis il sortit de l’église par la grande porte, que les sacristains venaient d’ouvrir, et s’en retourna lentement chez lui, cherchant à deviner quelle pouvait être cette femme si hardie, si artiste, si puissante, si pleine de charme dans ses paroles et de majesté dans sa démarche.

Le lendemain, à minuit, le comte était devant l’Arse-