Page:Sand - Le compagnon du tour de France, tome 1.djvu/177

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bien qu’on prenne la peine de lui montrer les choses sous leur vrai jour.

— Je ne demande que cela, dit Pierre. Voyons, les portes sont-elles bien fermées ? Y a-t-il quelqu’un parmi vous devant qui je ne doive pas m’expliquer ? Quant à moi, je n’éprouve ni crainte ni embarras à vous dire ce que je pense. Vous conspirez ou vous ne conspirez pas, messieurs, peu m’importe ; mais vous exprimez-des vœux, des sentiments, et je ne vois pas pourquoi je ne me donnerais pas le même plaisir. Je ne suis pas venu ici pour être interrogé, je pense ; car vous n’avez rien à apprendre de moi, et vous savez probablement tout ce que j’ignore. Laissez-moi donc parler. Il est bien évident que personne ici ne croit à l’amour des Bourbons pour les institutions libérales. Il est bien certain que nous n’avons ni confiance ni sympathie pour ce gouvernement-là, et que nous en choisirions, si nous pouvions, un autre dès demain. Quel serait-il ? Ici, nous autres gens simples, nous resterons court en attendant votre réponse. Nous trouvons plusieurs noms sur vos programmes ; car nous lisons quelquefois les journaux, et nous voyons bien que les libéraux ne sont pas tout à fait d’accord entre eux. Je crois, par exemple, que, sans sortir d’ici, on trouverait des avis bien différents. Monsieur l’avocat serait pour La Fayette, si je ne me trompe, et monsieur le médecin pour un autre qu’il ne nomme pas. Monsieur le capitaine serait pour le roi de Rome, et le père Vaudois ne voudrait pas entendre parler de cela peut-être ; ni moi non plus : qui sait ? Enfin vous avez tous quelqu’un en vue, et je ne gagnerais rien à savoir ce que veut chacun de vous ; aussi n’est » ce pas là ce que je demande…

— Que demandez-vous donc ? dit le médecin un peu sèchement.

— Je ne demande pas qui l’on mettrait à la place du