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DU TOUR DE FRANCE.

ces paroles qui tuent l’idéal, et de ces réponses que rien ne peut effacer. Le Corinthien, consterné, se demandait avec épouvante si c’était de l’amour ou de la haine qu’il y avait entre lui et Joséphine.

Jusque-là de telles précautions avaient été prises par eux, que pas un souffle, pas un bruit imprudent n’avait troublé le silence des longues nuits du vieux château. Mais, dans ces deux nuits d’orage, on se fia trop à l’épaisseur des murs et à la situation isolée de l’appartement. Le comte, qui dormait peu et d’un sommeil léger, comme tous les vieillards, fut frappé des cris étouffés, des sourds gémissements et des éclats de voix soudainement comprimés, qui semblaient s’exhaler des flancs massifs de la muraille. Le passage secret passait non loin de sa chambre à coucher. Il le savait, mais il ignorait qu’une communication pût être établie entre cette impasse et le boyau plus étroit et plus mystérieux que le Corinthien seul avait découvert dans la boiserie de la chapelle.

Le vieux comte croyait peu aux revenants. Il pensa d’abord à sa petite-fille, se leva, et approcha de son appartement qui était situé au bout du corridor et qui avait une communication par la tourelle avec l’atelier. Il n’entendit aucun bruit, entra doucement, trouva Yseult paisiblement endormie, et traversa sa chambre pour descendre le petit escalier tournant qui conduisait au cabinet de la tourelle. Durant ce court trajet, les bruits étranges qui l’avaient frappé ne se firent plus entendre. Mais quand il se fut avancé sur la tribune de l’atelier, il lui sembla les retrouver encore.

Le comte avait toujours eu la vue très-basse, et en revanche l’oreille excessivement fine et exercée. Il entendit venir, comme par un conduit acoustique, deux voix qui se querellaient, et qui semblaient partir de très-loin. Il examina les sculptures avec son lorgnon ; mais le panneau