Page:Sand - Le compagnon du tour de France, tome 2.djvu/270

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
263
PROCOPE LE GRAND.

tières de la Pologne, avec tant de rapidité que les Hongrois n’avaient pas même songé à se défendre. De leur côté, les Orphelins, chargés de cimenter l’alliance avec le roi de Pologne avaient été l’aider à réduire les Chevaliers Teutoniques. Ils pénétrèrent en vainqueurs jusqu’à Dantzick, dont ils détruisirent le port et où ils remplirent des flacons d’eau de la mer pour porter de signe de lointaine victoire à leurs compatriotes. Après une bataille gagnée sur le grand maître des Chevaliers, ils firent prisonniers des mercenaires de Bohême, qu’il s’était attachés. Ils les traitèrent comme renégats et les jetèrent dans les flammes. Enfin, ayant forcé l’Ordre à capituler avec le roi de Pologne, ils reçurent de ce dernier de grands honneurs et de riches présents, et vinrent joindre Procope qui brûlait de rompre le honteux traité de Bâle.

Les deux Procope assiégèrent donc Pilsen, qui, malgré la victoire des Hussites dans tout ce district, était restée catholique et fidèle à l’Empereur. Ce siége fut long et opiniâtre. De fâcheuses diversions le firent interrompre. Un gros de Taborites s’était jeté sur la Bavière, et, surpris dans une embuscade, y avait été complètement écrasé. Les mêmes plaintes qui s’étaient élevées contre Ziska, vers la fin de sa laborieuse carrière, vinrent troubler le cœur magnanime de Procope. Dans ces moments de lutte désespérée, la foi au succès, surexcitée par l’impatience, se dévore et se détruit elle-même. Les Taborites se trouvaient, nomme au temps des dernières conquêtes du redoutable aveugle, dans une situation effroyable. Ils voyaient les Calixtins et les Catholiques se liguer de nouveau ensemble et les abandonner. Le salut de la cause ne reposerait bientôt plus que sur eux, et ils éprouvaient cette profonde et douloureuse terreur qui s’empare du plus ardent fanatisme