Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/113

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il a appris à connaître : il est environ neuf heures et demie.

À cette époque, une seule maison s’élevait dans cette solitude ; c’était une hôtellerie en même temps qu’une sorte de rendez-vous de chasse.

L’éminence, située au milieu de vastes plaines giboyeuses, étant souvent honorée de la halte des seigneurs du pays qui se réunissaient pour courre le lièvre, et pour dîner ou souper à l’enseigne du Geault-Rouge[1].

C’est ce qui explique comment une auberge assez petite, et située assez près d’une ville pour ne pas prétendre à arrêter d’opulents voyageurs, possédait, dans la personne de maître Pignoux, hôtelier du Geault-Rouge, un cuisinier du plus rare mérite.

Lorsque les gentilshommes du pays se donnaient le plaisir de la pêche aux étangs de Thevet, ils envoyaient vitement quérir maître Pignoux, qui venait, avec sa femme, dresser sa cantine au bord de l’eau, et qui leur servait, sous quelque belle feuillade, ces merveilleuses matelotes (on disait alors étuvées) qui avaient fait sa réputation. Il se transportait aussi dans les villes et châteaux pour les noces et festins, et en eût remontré, disait-on, aux maîtres-queux de M. le Prince.

L’auberge du Geault était solidement bâtie, à deux étages assez élevés, et couverte en tuiles d’un rouge criard qui se voyaient d’une lieue à la ronde. Protégé par les seigneurs du voisinage, maître Pignoux avait obtenu la permission de mettre une girouette sur son toit, privilége nobiliaire auquel il disait avoir droit, puisqu’il avait si souvent occasion d’héberger la noblesse. Aux cris aigres et incessants de cette girouette, qui semblait

  1. Coq, Gallus.