Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/124

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

espèce d’égorgeurs et de larrons que je connaisse. Je me suis tenu tranquille, pensant qu’ils partiraient bientôt ; mais j’ai entendu des mots italiens que j’ai un peu compris. Ils veulent, je crois, rester ici jusqu’au jour. Je me suis dit alors que, ne me voyant pas arriver à Brilbault, où je suis attendu à dix heures, mes gens, inquiets de moi, viendraient dans la nuit me trouver ici, où ils savent que je devais m’arrêter. Ce serait le mieux de les attendre. Ces reîtres ne sont qu’une douzaine ; j’ai pu à peu près les compter, et, quand je verrai arriver notre monde, je saurai bien nous frayer un passage vers eux à beaux coups d’épée sur ces drôles.

— Mon père, dit Mario, qui regardait à la fenêtre, ils sont vingt-cinq au moins à cette heure ! car en voilà encore une bonne bande qui vient d’arriver. Nos gens ne pensent pas encore à venir te chercher, et, d’un moment à l’autre, ces reîtres peuvent fouiller la maison du haut en bas pour piller.

— Eh bien, mon enfant, me voilà déguisé de pied en cap ; reste près de moi, comme pour soigner l’hôte malade. Si l’on vient, on nous laissera tranquilles. On ne maltraite et ne rançonne que les gens bien montés et bien vêtus… Ah ! à propos, mon cheval me fera reconnaître. Ils ont dû le voir !

— Ton cheval est caché, et le mien aussi.

— Vrai ? C’est donc le brave valet d’écurie qui aura trouvé moyen… Mais qu’ont-ils à crier ainsi, les brigands ? Les entends-tu ?

— C’est moi qu’ils appellent ! Reste-là, mon père ; ne t’enferme pas : ce serait donner des soupçons. Tiens, les voilà qui entrent dans la salle ici-dessous. J’y vais ! écoute tout ; les cloisons sont minces ; tâche de comprendre, et sois tout prêt à venir si je t’appelle à mon tour.