Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/164

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Pour toi, méchante femme, toute ma fortune, s’écria le marquis, pourvu que mon fils ait la vie sauve. Donnez, donnez la plume !

— Non pas, reprit la Proserpine. Ce n’est pas seulement ton bien que je veux, c’est ton nom, et tu vas signer la promesse de mariage.

Le marquis n’eut pas cru que cette diablesse oserait déclarer ses prétentions devant témoins.

Mais, bien loin d’en être scandalisés, les reîtres applaudirent comme à un très-bon tour, et le sang monta au visage de Bois-Doré, révolté du rôle abject et ridicule qui lui était assigné.

— Vous en demandez trop, madame, dit-il en levant les épaules ; prenez mon or et mes terres, mais mon honneur…

— C’est ton dernier mot, vieux fou ? Alors, ici, camarades ! une corde, et donnez-moi l’estrapade à ce marmot !

En parlant ainsi, l’odieuse fille montrait un grand croc de fer planté à la voûte de la cuisine et qui servait à suspendre les poids du tournebroche.

En un clin d’œil, on se saisit de Mario, qui cria au marquis :

— Refuse ! refuse, mon père ! je supporterai tout !

Mais le marquis était incapable de supporter, une seconde, la pensée de voir torturer son enfant.

— Donnez-moi la plume, cria-t-il, je consens ! je signe tout ce que vous voudrez !

— Donnons-lui toujours un ou deux sauts d’estrapade, dit l’un des bandits en commençant à attacher Mario ; ça rendra l’écriture du vieux plus coulante.

— Oui, faites ! répondit la Proserpine. Ce méchant enfant a bien mérité…