Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/166

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en s’injuriant avec fureur et se gourmant des pieds et des poings.

Ce vacarme était accompagné au bris des meubles dans la salle haute, où Macabre se débattait comme un diable pour se délivrer, et des cris aigus de la Proserpine, qui encourageait ses gens et commençait à craindre pour sa vie, s’ils avaient le dessous.

On pense bien que le marquis n’attendit pas l’issue de la lutte pour songer à la fuite. Il ne fit qu’un saut vers son fils pour le délier ; mais la corde était si artistement nouée, que dans son trouble, il ne pouvait parvenir à la défaire.

— Coupez ! coupez ! disait madame Pignoux.

Mais la main du vieillard était agitée d’un mouvement convulsif. Il craignait de blesser l’enfant avec le couteau.

— Laissez-moi donc faire ! dit Mario en les repoussant.

Et, avec adresse et sang-froid, il défit le nœud.

Le marquis le prit dans ses bras et suivit l’hôtesse et sa servante, qu’il vit courir vers l’office.

En s’élançant au dehors, il faillit tomber sur le seuil : un corps était étendu en travers ; c’était celui du Bréchaud. Il était mort ; mais près de lui gisaient deux reîtres, l’un transpercé d’une broche à rôtir, l’autre à moitié décapité par le tranche-lard. Jacques s’était vengé, et il avait dégagé le passage. Sa laide mais énergique figure avait une expression effrayante : elle semblait contractée par un rire de triomphe, et montrait ses crocs espacés comme si elle eût voulu mordre.

Le marquis vit rapidement qu’il n’y avait plus rien à faire pour le pauvre brèche-dents. Il tenait Mario serré contre sa poitrine et courait comme il pouvait.