Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/238

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— Oui, moi, répondit Bois-Doré, comme oncle, tuteur et père adoptif de Mario de Bois-Doré ici présent.

— Ici présent ! Non, dit M. de Beuvre toujours en riant, puisqu’il dort du sommeil de l’innocence.

— Comme il convient à l’enfance ! ajouta Guillaume avec douceur.

— Je ne dors pas ! s’écria Mario en s’élançant dans les bras de son père, et en montrant sa figure marbrée de sanglots étouffés dans ses mains.

— Oui-dà, dit M. de Beuvre, il nous dit cela avec des yeux bouffis de sommeil !

— Non pas ! reprit le marquis en examinant son enfant : avec des yeux brûlés de pleurs !

Lauriane tressaillit : la douleur de Mario lui rappelait la scène du labyrinthe et lui remettait devant l’esprit les appréhensions qu’elle avait oubliées. Les larmes de cet enfant lui firent mal, et le regard de Mercédès l’inquiéta comme un reproche.

Lucilio paraissait partager cette anxiété. Lauriane sentit qu’elle tenait dans ses mains, pour longtemps, pour toujours peut-être, le bonheur de cette famille, qui lui avait donné tant de bonheur à elle-même. Elle devint tout à fait triste, et, voyant que le marquis pleurait aussi, elle alla donner au vieillard et à l’enfant un baiser d’égale tendresse, en les suppliant d’être raisonnables et de ne point s’affecter d’un avenir qu’elle n’avait pas encore envisagé.

De Beuvre haussa les épaules.

— Vous voilà tous très-ridicules, dit-il ; et vous, Bois-Doré, je vous trouve trois fois fou d’avoir nourri de vos romans imbéciles la cervelle de ce pauvre écolier. Vous voyez où mènent les gâteries. Il se croit un homme et veut se marier, à l’âge où il n’aurait besoin que du fouet.