Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/24

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que Votre Altesse a constitué abbé fiduciaire de Fontgombaud, saurait-il prendra des mesures…

— Non, dit le prince avec un peu de vivacité, je vous défends… je vous prie de ne lui en rien faire savoir. On m’a assez blâmé des faveurs dont j’ai récompensé les bons services de M. de Rochefort ; on ne manquerait point de dire que j’enrichis mes créatures des dépouilles des vaincus. On reproche d’ailleurs à Rochefort d’être avide, et, de vrai, il l’est peut-être un peu. Je ne répondrais point qu’il confisquât ces choses au profit du culte.

— J’ai touché juste, pensa le recteur : le trésor fait dresser l’oreille. Il faudra bien que monseigneur soit mon obligé.

Le prince vit la satisfaction intérieure et légèrement dédaigneuse de son interlocuteur. Le recteur n’était pas altéré d’argent et de pierreries. Il l’était de crédit et de pouvoir. Condé le comprit et s’observa davantage.

— D’ailleurs, ajouta-t-il, il serait fâcheux de faire du bruit pour peu de chose. Ce trésor, contenu dans quelque vieux coffre en un grenier de campagne, ne vaut pas, je pense, la peine que l’on s’y donnerait.

— Ce trésor est pourtant une source vive où s’alimente le luxe du vieux marquis.

— Il y a longtemps qu’il y puise, reprit le prince ; il doit être à sec ! Je l’ai quelque peu connu, votre hobereau ; c’est un marquis pour rire, de la façon du roi de Navarre. Il était admis dans l’intimité de mon bon oncle !

Condé ne parlait jamais de Henri IV qu’avec une ironie pleine d’aversion. M. Poulain remarqua l’amertume de son accent, et sourit de manière à satisfaire le prince.

— Le marquisat de Bois-Doré est, dit-il, une plaisanterie