Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/246

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de répondre comme son cœur l’y portait. Elle baissa les yeux sur son assiette et retint une larme au bord de sa paupière.

Mario qui ne semblait occupé qu’à préparer le dîner délicat du petit chien Fleurial, vit cette larme et dit tout à coup d’un air sérieux, presque viril, qui contrastait avec la puérile occupation de ses mains :

— Mon père, nous faisons de la peine à Lauriane, ne parlons plus de rien. Elle a une tête, et elle a raison. Pour moi, je ferais comme elle à sa place, et je n’abandonnerais pas mon parti dans le malheur.

— C’est bien parlé, mon petit homme ! dit de Beuvre, frappé de l’air sage de Mario.

— Et c’est-à-dire aussi, ajouta le marquis, que nous sommes au-dessus de ces vaines discussions. Mon fils a déjà le libre esprit des bons esprits, et ce n’est pas lui qui contrarierait les opinions de Lauriane.

— Les contrarier, non certes, reprit Mario ; mais…

— Mais quoi ? dit Lauriane vivement ; tu ne viendrais pas à les partager, Mario, même par amitié pour moi ?

— Ah ! ah ! si cela était, s’écria de Beuvre, encore frappé d’une idée subite, si l’enfant, avec son nom et ses biens, voulait entrer résolûment dans notre cause, je ne dis pas que je ne conseillerais pas à Lauriane de garder encore quelque temps son bonnet noir.

— Qu’à cela ne tienne ! dit le marquis ; quand le temps sera venu…

— Non pas ! non, mon père ! dit Mario avec une fermeté extraordinaire ; ce temps-là ne viendra point pour moi. J’ai été baptisé catholique par l’abbé Anjorrant ; j’ai été instruit par lui dans l’idée que je devais ne pas changer ; et, bien qu’il ne m’ait rien fait jurer à son lit