Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/280

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fit la veillée avec plusieurs jeunes gens, volontaires comme lui, avec lesquels il avait fait connaissance en route.

C’était dans une assez misérable auberge, dont la salle basse était encombrée à ne s’y pouvoir retourner, et remplie de la fumée du tabac à ne s’y pas reconnaître.

Tandis que l’armée régulière était muette et sobre comme une communauté de moines austères, les corps de volontaires étaient joyeux et bruyants. On buvait, on riait, on chantait des couplets libres, on disait des vers érotiques ou burlesques ; on parlait politique et galanterie ; on se disputait et on s’embrassait.

Mario, assis sous le manteau de la cheminée, rêvait au milieu du vacarme.

Près de lui se tenait Clindor, devenu assez résolu, mais intimidé de se trouver ainsi en pleine noblesse. Il ne se mêlait point aux bruyantes conversations ; mais il grillait d’en avoir le courage, tandis que Mario se laissait bercer dans ses rêveries par ce tumulte, qui ne le tentait pas et qui ne le gênait pas non plus.

Tout à coup Mario vit entrer une créature fort bizarre.

C’était une petite fillette maigre et noire, parée d’un costume incompréhensible : cinq ou six jupes de couleurs voyantes, étagées les unes sur les autres ; un corps tout brillant de galons et de paillettes, une quantité de plumes bariolées dans ses cheveux crépus et frisottés, une masse de rangs de colliers et de chaînes d’or et d’argent ; des bracelets, des bagues, des verroteries jusque sur ses souliers.

Cette étrange figure n’avait pas d’âge. C’était un enfant précoce, ou une jeune fille fatiguée. Elle était fort petite, laide quand elle voulait sourire et parler comme