Page:Sand - Les Maitres sonneurs.djvu/347

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de bouder le diable ; mais Thérence me tenait le cœur en respect comme si elle eût été cousine de la sainte Vierge.

Comme je sortais du vieux château, un homme, que je ne voyais pas dans l’ombre du portail, me surprit en me portant la parole :

— Hé, l’ami, disait-il, apprenez-moi si c’est là, comme je pense, l’ancien château du Chassin ?

— Le grand bûcheux ! m’écriai-je, le reconnaissant à la voix. Et je l’embrassai d’un si grand cœur qu’il en fut étonné, car il n’avait pas autant souvenir de moi comme j’avais de lui.

Mais sitôt qu’il m’eut remis, il me fit grandes amitiés et me dit :

— Apprends-moi vitement, mon garçon, si tu as vu mes enfants, ou si tu les sais arrivés en cet endroit.

— Ils y sont depuis ce matin, répondis-je, ainsi que moi et ma cousine Brulette. Votre fille Thérence est là, bien tranquille, tandis que ma cousine est, ici près, à la noce d’une autre cousine, avec votre cher bon fils Huriel.

— Dieu merci ! dit le grand bûcheux, je n’arrive pas trop tard, et Joseph est, à cette heure, sur la route de Nohant, où il croit bien les trouver ensemble.

— Joseph ? il est donc venu comme vous ? On ne vous attendait tous deux que dans cinq ou six jours, et Huriel nous disait…

— Tu vas savoir comment tournent les choses de ce monde, dit le père Bastien en me tirant un peu sur le chemin, afin de n’être entendu que de moi. De toutes les choses qui vont au gré du vent, la cervelle des amoureux est la plus légère. Huriel t’a-t-il raconté tout ce qui regarde Joseph ?

— Oui, de tous points, que je crois.

— Joseph, en voyant partir Huriel et Thérence pour le pays d’ici, lui parla dans l’oreille ; sais-tu ce qu’il lui a dit ?