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LA
FILLE D’ALBANO



C’était un dimanche, et l’un des beaux jours de mai ; le son de la cloche vibrait au fond de la vallée ; tout le hameau avait un air de fête. Les jeunes filles couraient avec leur bonnet blanc à tuyaux empesés ; le garde champêtre marchait gravement avec la plaque luisante au bras ; des jeunes gens apportaient des corbeilles pleines de fleurs, et d’autres suspendaient au porche gothique de l’église paroissiale de fraîches guirlandes de pervenches et de marguerites qui fuyaient sur les crevasses poudreuses et les arabesques éraillées du frontispice. Les hirondelles décrivaient de grands cercles dans le ciel bleu, et, dans l’air embaumé de violettes, on respirait un parfum de bonheur !

C’était bien autre chose au château ! Le château était un de ces vieux manoirs qui s’effacent peu à peu du sol de la France, et que le voyageur aime tant à retrouver habillés, avec leur air d’opulence seigneuriale, leurs tableaux de famille et leurs grandes cours ouvertes à tout venant, au carrosse armorié du seigneur voisin, au souple landau du riche industriel,