Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/104

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la femme et tout le bien que je pensais du mari :

— Pour celui-là, dit-elle, tu ne te trompes pas. C’était un jeune homme très-digne et très-bon, on l’estimait dans la famille de Mauville, mais je l’ai tellement perdu de vue… Et puis, où ne va-t-il pas t’emmener, puisqu’il a encore la passion des voyages ?

— Ses voyages ne seront ni lointains ni périlleux, puisqu’il a une jeune femme qui ne partage pas son goût et qui ne paraît pas bien forte.

— Et il est très-épris de cette jeune femme ?

— Je crois qu’il ne vit que pour elle.

— Il est bien âgé pour qu’elle partage sa passion ! Tu es jeune toi, et pas trop laid ; tu ne crains pas qu’il ne devienne jaloux de toi ?

— On peut se quitter le jour où on n’a plus confiance l’un dans l’autre. Je n’attendrais pas que le soupçon me menaçât d’un scandale ou seulement d’un outrage.

— Tu as envie d’accepter, je le vois.

— Certes j’ai envie de gagner dès demain ce que je ne gagnerai certainement pas dans dix ans, si je refuse. J’ai aussi envie de voyager un peu. Je crois qu’on apprend beaucoup à changer de milieu. Pourtant, comme je n’ai point envie de te faire de la peine, je refuserai, si tu le veux.