Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/195

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voulais pas supposer que Richard fût résolu à réaliser les espérances qu’il avait données. Je ne me faisais pas scrupule de dénouer l’engagement invoqué, de montrer un avenir plus simple et plus vrai, de la détacher en un mot d’un joug léger en apparence, mais implacable en réalité.

M’entendait-elle ? me comprenait-elle ? Je n’en sais rien. Elle pleurait, les mains dans les miennes, les yeux baissés, voilés par ses longues paupières, la joue brûlante, le cœur oppressé.

Je lui fis prendre la potion, et, la voyant mieux, je voulus m’en aller.

— Ne la quittez pas, dit Dolorès, vous voyez que je la fâche et l’irrite malgré moi ; votre présence et vos paroles lui font du bien. Restez encore un peu, vous le devez.

J’eus la lâcheté de rester, même après que la malade, abattue par la potion, se fut endormie. Je pris un livre que je paraissais lire, Dolorès sortit sur la pointe du pied.

Le but de cette fille était visible, elle voulait unir nos destinées ; mais comment l’entendait-elle ? Désirait-elle me faire trahir la confiance de sir Richard et me donner les droits de l’amour, tout en lui réservant les charges du mariage ? Avait-elle deviné mes agitations ?