Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/264

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que j’avais connu un peu son père, sous de mauvais rapports, je dois l’avouer ; mais ce n’est pas une raison pour que la señora Manuela ne soit pas une personne recommandable.

— Je suis sûre, moi, qu’elle est charmante, reprit Jeanne avec ingénuité, M. Brudnel ne peut faire qu’un bon choix. Tu la connais, Laurent, parle-nous d’elle.

— Cela ne peut vous intéresser que médiocrement, répondis-je, parlons plutôt de toi. Parle-moi musique ; as-tu fait de grands progrès ?

Et, comme je voyais qu’elle allait insister sur le compte de Manuela :

— Allons, repris-je, joue-moi quelque chose, j’ai soif de musique ; il y a si longtemps que j’en suis privé !

— Eh bien, s’il faut te l’avouer, répondit-elle, il y a huit jours que je n’ai ouvert mon piano, pas depuis que j’ai joué pour M. Brudnel.

— Est-ce qu’il t’a dégoûtée de la musique ?

— Bien au contraire ! mais enfin en musique comme en tout il y a des phases de recueillement…

— D’ailleurs il faut qu’elle s’occupe du dîner, dit ma mère, elle l’a promis, et pour aujourd’hui je consens à ne me mêler de rien, afin de rester près de toi. Va,