Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/266

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— Si tu me disais, reprit-elle, qu’il songeait peut-être à moi, je te dirais que tu es fou ; mais, quand tu penses qu’il songeait à Jeanne, tu es vraiment stupide.

— C’est possible. Pourtant sir Richard a de grandes séductions, et à l’heure qu’il est je me trouve en rivalité avec lui, forcé de le regarder comme un rival très-redoutable. Les femmes sont si étranges !

— Jeanne n’est point étrange ; elle est intelligente et noble. Je te prie de ne pas continuer cette plaisanterie qui la blesserait et qui m’afflige.

— Pardonne-la-moi ; mais alors dis-moi si Jeanne aime quelqu’un.

— Qui te le fait supposer ?

— J’ai vu Médard Vianne. Il renonce à elle et refuse de me dire pourquoi. Il dit que c’est à toi de me l’apprendre, et j’attends je ne sais quelle révélation.

— Tu l’attendras ! S’il y avait au fond du cœur de ma sainte fille un secret quelconque, je ne te le dirais pas avant de savoir si ton cœur, à toi, est resté assez pur pour recevoir une si délicate confidence.

— Tu n’as plus confiance en moi, et tu doutes ? Je croyais trouver ici le baume sur la plaie, et j’y trouve un redoublement de tristesse, d’incertitude et de confusion pour moi.