Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/294

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sans être guérie, est hors de danger et reprend la petite santé qu’elle avait avant ces grands orages. Elle n’est plus sous le coup de la passion, et, quoi qu’elle en ait dit, elle tient à vivre ; elle s’effraye de la violence de son entraînement et se la reproche. Elle se prosterne devant M. Brudnel, et M. Brudnel… l’épouse !

— Ah ! m’écriai-je en sautant comme un jeune cheval qu’on met en liberté, il a raison, le digne homme ; je recommence à l’aimer de toute mon âme.

Ma joie était si naïve, que ma mère ne put se défendre d’en rire.

— Me pardonnes-tu, dit-elle, de ne t’avoir pas dit plus tôt ce résultat que j’avais si bien prévu ? Il y a quinze jours que je le connais, mais je voulais être sûre qu’il n’y avait rien de sérieux dans ton amour.

— Si fait, cela a été sérieux ! J’ai beaucoup lutté, j’ai follement souffert ; mais ce n’était ni profond ni durable, et je ne me faisais pas d’illusions sur mon compte. Je le sais à présent, je le sentais dès lors, je ne puis donner mon âme qu’à une femme comme ma sœur ou comme toi. Que veux-tu ! j’ai été trop gâté à la maison ! Mais dis-moi comment M. Brudnel compte agir à mon égard ou comment je dois agir avec lui. Me demande-t-on de reprendre ma parole ?