Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/297

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— Est-ce que par hasard tu serais né jaloux à ce point que le mari de ta sœur te serait d’avance antipathique ?

— Je ne crois pas être né jaloux ; mais j’ai vécu trop jeune d’aspirations trompées. Cette Manuela, dont je rêvais au collége et qui plus tard a été une si grande déception pour moi, a laissé en moi un levain d’amertume. Je me corrigerai à présent que le charme est rompu, et je te réponds que je ferai tout au monde pour être le meilleur ami de mon beau-frère.

— C’est bien vu ; mais où prends-tu ton beau-frère après tout ce que vous avez résolu, ta sœur et toi, en mettant l’amour en poudre ?

— Était-ce sérieux de la part de Jeanne ? N’aime-t-elle réellement personne ?

— Si elle aimait quelqu’un en dehors de nous, tu le saurais. Personne n’est plus sincère ; mais es-tu donc dans une disposition d’esprit à souffrir, si elle faisait un choix ?

— Eh bien, oui ; tu vas dire que c’est encore de l’égoïsme, et je le sens si bien, que je te promets de vaincre ce mauvais sentiment, si je dois être mis à l’épreuve ; mais comprends donc le doux rêve de bonheur que nous pourrions réaliser si un étranger ne se plaçait jamais entre nous !