Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/41

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mais un peu de la voir si fantasque. Était-ce un cœur agité par le doute ou une raison troublée par le mysticisme ?

Je crus devoir en parler à ma mère, et je fus surpris de ne pas la voir plus tourmentée.

— Jeanne est comme cela, me dit-elle, très-singulière et toujours à côté du réel, bien qu’elle soit foncièrement bonne et sincère. Tu ne la connaissais pas ; depuis quelques années, vous n’êtes guère ensemble, tu l’observes, et tu commences à t’étonner. Ne t’en inquiète pas et sois toujours très-bon pour elle ; c’est une nature qu’on ne persuade pas, mais qu’on vaincra toujours par la tendresse. On ne l’amène point à la faire penser comme l’on pense soi-même, mais l’affection l’amènera toujours à agir comme l’on veut.

— Pourquoi donc alors lui as-tu laissé embrasser le catholicisme ?

— J’avais promis qu’il en serait ainsi.

— À qui avais-tu promis cela ? À mon père ? Il y tient si peu !

— Est-ce un reproche que tu me fais ? Je ne le mérite point. — Mais voilà des voyageurs, va vite au-devant d’eux.

Nous étions ainsi interrompus à chaque instant, car mon père avait prédit juste. La vogue venait aux bains