Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/85

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pied. On peut très-bien monter à pied, n’est-ce pas ?

— Très-bien, répondis-je.

— Non, dit l’Anglais, trois heures de marche, c’est trop pour vous, ma chère, je m’y oppose absolument.

— Est-ce qu’il faut trois heures ? reprit-elle en se tournant vers moi.

— D’ici, répondis-je, il n’y en a plus que pour une heure et demie.

— Eh bien, mon cher, dites donc cela à mon mari !

Je regardai l’Anglais, qui ne sourcilla pas.

— Il y a, me dit-il, une chose bien simple. C’est que vous portiez la chaise de madame avec celui de nos hommes qui n’est pas malade.

Et, comme je souriais, il ajouta :

— Je payerai ce que vous voudrez.

J’étais habillé absolument comme un montagnard, c’était mon habitude dès que j’arrivais au pays : le berger, qui m’avait vu tout jeune, me tutoyait ; la méprise était naturelle. Je ne m’en fâchai pas ; mais je refusai, disant que nul n’a le droit de porter la chaise, s’il n’est patenté à cet effet, et que je n’avais pas la plaque.

— Alors attendons, dit l’Anglais.

— Non, n’attendons pas, reprit sa femme ; ce porteur ira en chercher un autre, et ils nous rejoindront